« Mon Amour,
Tu es certainement venu t’isoler dans ton bureau après ce que je viens de te révéler, et tu auras besoin de réfléchir longuement aux raisons qui m’ont poussée à trahir ta confiance. Mais tu les comprendras, je sais que tu peux les comprendre, Lucius.
Au moment où tu lis ces lignes, je suis en train de nous faire couler un bain à tous les deux, que tu rejoindras quand tu seras prêt à laisser cette décision derrière nous et l’espoir pour notre fils être notre seul objectif. Car il ne s’agit que de Draco, et uniquement de Draco.
Quant à l’espoir, aussi mince soit-il, il existe et porte le nom de Harry Potter… peut-être oserais-je te dire qu’il porte aussi celui de Severus Snape. Oui, mon Aimé… ton petit protégé malingre et chétif sera sans doute celui qui nous aidera à sauver notre enfant, comme nous l’avions sauvé, lui, lorsqu’il l’était encore. Espérons, car c’est, avec notre amour, tout ce qu’il nous reste, que Potter ait le temps d’accomplir la prophétie.
Espérons, mon Amour, espérons que nos deux trahisons permettent de sauver notre unique fils.
Je t’attends,
Narcissa. »
Une goutte tomba sur le prénom et noya l’encre qui s’étala lentement sur le vélin. Lucius caressa la signature de son pouce et gémit piteusement. Il plia la lettre et la fourra dans la poche intérieure de son veston, puis ouvrit son tiroir secret où il était venu chercher une petite gemme noire. Il ressortit le cœur lourd, retournant dans le cabinet de sa femme, sans oser lever les yeux vers son cadavre et jeta la gemme sur le corps. Un éclat sombre entoura les restes, avant qu’un beau cercueil de verre facetté ne trône à la place. Lucius fit courir sa baguette le long d’une face, lui faisant prendre un aspect quasi opaque. À présent, seule la silhouette de son épouse était visible, protégée à jamais par cet écrin magique. Il agita une dernière fois la baguette et une gigantesque langue de feu s’échappa de la cheminée pour venir lécher le bureau et faire exploser les fenêtres. Lucius en enjamba une, baguette tirée, et sauta. Il laissa derrière lui le manoir Malefoy en flammes, ses salles ayant accueilli des mots d’amour murmurés et des soupirs d’extase partagés partir en fumées.
***
Severus observa gravement Harry et se leva en silence. Surpris, le jeune homme demanda :
« Cela vous touche… ?
— Elle m’a sauvé la vie, une fois, finit-il par répondre. Elle m’a soigné toute une nuit. Et elle a su quelle décision prendre pour préserver ceux qu’elle aimait. Narcissa n’a jamais été une Mangemort. Elle ne méritait pas un tel sort.
— Crois-tu qu’il s’en prendra à leur fils ? demanda Jane en repensant à son ancien élève avec une certaine inquiétude.
— Il va certainement à Poudlard dans ce but. Il cherchera à attirer le père pour le tuer sous ses yeux, Il aime faire ça.
— Attendra-t-il seulement l’aube comme le supposait Harry ? » S’alarma Luna.
Severus les fixa brièvement et porta son regard sur l’horloge qui annonçait à présent 21h30. Son ventre grondait et il sentait déjà ses membres s’engourdir de fatigue. Sa marque était tantôt glaciale, tantôt brûlante et il se sentait incapable de répondre à cette question.
« Pour attaquer à nouveau Poudlard, commença-t-il lentement. Même si l’école Lui est déjà acquise, Il rassemblera certainement ses troupes… Et Il nous appellera sur place via la Marque. Tous. Quant à toi, ajouta-t-il en désigna Harry de l’index, Il t’attirera d’une façon ou d’une autre pour en finir. Il cherchera donc un moyen de te convaincre, et ça sera certainement via votre lien…
— Qu’est-ce que ça change pour Harry que Tom sache ce qu’il est ? Est-ce qu’il peut tirer sur le lien de façon différente ?
— … Au vu de ce qu’Harry nous a dit de l’autre soir, je pense qu’Il essaie depuis quelque temps de le posséder comme Il en est capable avec son serpent.
— Pourquoi ça n’a pas marché, alors ? demanda Harry.
— Parce qu’aussi fortes qu’aient été tes émotions à cet instant, elles étaient surtout positives, murmura Luna. Passionnées et un peu brutales, mais pleines d’amour. Et c’est quelque chose qui le repousse naturellement. Aucune âme déchirée comme la sienne ne peut supporter quelque chose d’aussi puissant. Regarde comme il est si difficile quand on a une âme intacte d’accueillir et de porter l’amour… »
Severus écarquilla les yeux en observa la jeune fille avec respect. Il lui décocha un de ses rares sourires et acquiesça.
« C’est sans doute pour cela qu’Albus vous a légué un de ses immondes chapeaux… Il a dû vous en sentir digne.
— Tout ça c’est très charmant, coupa brutalement Jane. Mais ça ne nous dit pas combien de temps il nous reste. Quand sera-t-Il à Poudlard ? Avec qui ? Viendra-t-Il avec sa bestiole ?! C’est CA que vous devez déterminer. Si c’est la fin, autant qu’on y prenne part correctement. »
Jane semblait profondément en colère et regardait avec dépit le plat de pâtes et de sauce tomate. Elle poursuivit, néanmoins :
« Vous avez dit tout à l’heure que vous Le regardiez, vous pourriez le refaire pour comprendre ce qu’Il a en tête ? Si ça marche dans un sens… ça peut marcher dans l’autre, non ?
— C’est… très risqué, Jane.
— Attendre d’avoir des nouvelles, si elles arrivent, par les autres d’autant plus. Je vais prévenir Black, vous, aidez-le à espionner l’autre fou.
— Mangeons d’abord, il va lui falloir quelque chose dans l’estomac.
— Si vous y tenez. » Soupira Jane qui pianotait déjà.
***
« A mon cousin, Sirius Black,
D’une façon ou d’une autre, tu dois déjà savoir que je n’ai pas tendu de piège à Severus Snape, ou à ton filleul. Tu sais donc que j’ai participé à la chute du Seigneur des Ténèbres, d’une façon ou d’une autre. J’espère ainsi, avec sans doute de la naïveté, pouvoir mettre mon fils, Draco, ton cousin, en sécurité.
Le choix que j’ai fait et les actions de Lucius pourraient nous coûter la vie, et si notre fortune et l’éducation que nous lui avons données mettront Draco à l’abri du besoin, il y a une chose sur laquelle nous ne pourrons rien : il aura besoin de ton intervention pour laver son nom et éviter toutes représailles.
Je te supplie de l’aider. D’user de ton nom et de ta notoriété pour le mettre en sécurité. Je te supplie d’oublier la haine qui nous a lié durant des années et de sauver un innocent.
Respectueusement,
Narcissa Malefoy, née Black »
Sirius leva les yeux de la lettre et resta un instant à fixer son verre de Whisky sans rien dire. Le hibou qui la lui avait apportée s’était déjà envolé, Narcissa n’attendait sans doute aucune réponse. Et quelle réponse pouvait-il donner, d’ailleurs… ? Il jeta un regard en coin à Hermione qui grignotait sans faim le sandwich qu’elle s’était fait, le nez plongé dans la Gazette du Sorcier. Peut-être qu’elle ou Tonks avaient raison, finalement ? Peut-être qu’il était temps de… La sonnerie du petit portable à clapet s’éleva et Hermione sursauta, avant de le sortir rapidement de sa poche. La jeune fille le laissait constamment allumé depuis le sms inquiétant de Jane à propos de leur fuite. Ce qui l’obligeait à aller régulièrement au café du coin tenter de le brancher discrètement. Hermione écarquilla les yeux en lisant le sms.
« Que se passe-t-il ? s’inquiéta Sirius en pliant maladroitement la lettre.
— Harry dit que Voldemort sait pour la chasse aux Horcruxes… Apparemment, il aurait attaqué le manoir Malefoy et tué Narcissa Malefoy.
— QUOI ?! »
La main qui tenait le Wisky trembla et Sirius ne se rendit pas immédiatement compte qu’il en avait versé. Il fixait Hermione sans la voir, ses yeux happés soudain par un vieux souvenir.
Il était des années plus tôt, dans cette même cuisine, cherchant désespérément à attraper du pain et un peu de crème. Son ventre le faisait souffrir de faim. Il avait été puni par Mère, il ne se souvenait même plus pourquoi. Alors qu’il tentait d’attraper la nourriture trop haute pour ses petites jambes, les victuailles se mirent à flotter et à descendre doucement dans sa direction. Il s’en saisit avant de se retourner pour tomber nez à nez avec une jolie petite fille blonde qui le fixait. Sirius lui sourit, reconnaissant, tirant une ébauche de réponse de la part de l’inconnue, quand la voix de Mère retentit :
« Narcissa, ma fille, ne traînez donc pas dans la cuisine. Ce sont les domestiques ou les femmes de basse extraction qui restent aux fourneaux. »
Le sourire de la jeune fille mourut aussitôt et elle fixa alors Sirius avec un regard terriblement dur. L’enfant eut l’impression soudain d’être un indésirable qui ne méritait pas de croiser son regard. Elle tourna des talons et Sirius regarda alors son pain avec la terrible impression d’être seul dans cette horrible maison.
« Sirius ? Tu m’écoutes ?! » s’inquiéta Hermione.
Black revint brutalement dans le présent, les yeux rivés sur son verre comme il l’avait jadis fait de la miche de pain. Narcissa, pensa-t-il, l’énigme qu’il n’avait jamais pu percer. Amie ou Ennemie… ?
« Oui, pardonne-moi. Elle était quand même ma cousine.
— Je suis désolée. J’ignorais que tu entretenais de bonnes relations avec elle.
— Non. Mais nous aurions pu. Dans un autre monde, murmura-t-il pour lui-même en vidant d’une traite le verre.
— Le message ne s’arrête pas là, il y a plus grave, pressa Hermione. Ils ne savent pas quand, mais ils sont persuadés que Voldemort va retourner à l’école pour Draco.
— Pourquoi pour lui ?!
— Si Il en a après la famille Malefoy… Il a dû apprendre pour la coupe… et le journal. Malefoy est en grand danger. L’école est en grand danger. Il faut impérativement les prévenir ! Sirius, on doit parler à Phineas ! »
L’Animagus se leva en trombe et se précipita en direction de son bureau, Hermione sur les talons, mais quand ils arrivèrent face à la peinture, elle était vide.
***
Horace Slughorn n’aimait pas être Directeur de Poudlard. Chaque matin, il recevait une lettre de Lucius Malefoy lui exprimant son soutien indéfectible et lui faisant par des changements légaux opérés au Ministère. Chaque matin, il avait sur son bureau un pli ampoulé lui rappelant pourtant qu’il n’était qu’un pion entre les mains de Voldemort. Terrorisé depuis l’attaque, démoralisé depuis qu’il avait investi le bureau et trouvé sur ce dernier une petite boîte d’ananas confits l’enchaînant à sa plus grande erreur, Slughorn tremblait à chaque bruit suspect et dépérissait à vue d’œil. Son front se garnissait, son embonpoint ne cessait de croître. Son seul instant de répit, entre les rappels à l’ordre des Mangemorts et les visites impromptues du portrait de Dumbledore était celles du petit chat blanc qui acceptait bien volontiers des câlins pourvu qu’on lui donne de belles et bonnes choses. Mais, depuis quelques temps, le chat se faisait absent, et le vieux Serpentard regrettait terriblement l’époque mouvementée de sa cavale.
Alors, quand un hibou se percha sur le rebord de sa fenêtre et qu’il détacha une lettre adressée à Draco Malefoy, il craqua. Sa grosse face enfantine disparue entre ses mains, et il pleura. Il pleura longuement Dumbledore qui lui manquait terriblement. Et il pleura, une nouvelle fois de honte, pour ce qu’il avait fait 50 ans plus tôt.
« Séchez vos larmes, Horace. » Lui dit la voix bienveillante du vieil homme qui venait de se glisser dans son portrait. « Une simple lettre ne peut vous mettre dans de pareils états, la visite que vous allez recevoir vous demandera de…
— Pitié, Albus. Pitié, je n’en peux plus de vos secrets, de vos manigances, pitié… Dites-moi que c’est bientôt terminé. »
Trois coups brutaux d’un instrument sur le bois le fit se taire immédiatement. Dumbledore se cacha dans un autre portrait, avant de glisser :
« Bientôt… je vous le promets.
— Entrez… ? »
Lucius Malefoy franchit la porte d’un pas rapide et la claqua derrière lui. Il était essoufflé, ses cheveux s’emmêlaient sur son front par la sueur, ses yeux étaient rougis et cernés et par-dessus tout : il dégageait une horrible odeur de bois et de chaire brûlés.
« Draco. Faites venir Draco. Je dois immédiatement le voir.
— Draco ? Mais, justement, je venais de recevoir une lettre qui lui était adressée et…
— FAITES MANDER MON FILS !
— Heu… Oui, très bien… Wendy ? Appela Slughorn. Amène-nous le jeune Malefoy de toute urgence. »
Lucius s’humecta les lèvres, tenant fermement sa canne comme s’il s’apprêtait à s’en servir. Horace avait très bien connu ce Serpentard ambitieux et d’exception qu’il avait beaucoup apprécié plus jeune. Séduisant, intelligent, venant d’une famille riche et respectable, Lucius avait fait partie de ses pépites de collection, et jamais l’ancien Directeur de maison ne l’avait vu dans un tel état. Il se leva et se dirigea sans un mot vers son bar, pour servir un Whisky Pure-Feu au blond qui le regarda interloqué.
« Que se passe-t-il ? » Demanda Horace, d’un air préoccupé.
Lucius repoussa le verre de la main et continua de se murer dans le silence. Quand le pop sonore de l’elfe retentit, il tira sa baguette de sa canne. Draco semblait tout aussi surpris que Slughorn et il leva les deux mains en signe d’apaisement. L’elfe se tourna vers le Directeur et déclara d’un air entendu :
« Il n’était pas dans sa salle commune, Monsieur.
— Où étiez-v…
— Père ? s’inquiéta Draco. Que se passe-t-il ? Que faites-vous ici ? »
Était-ce l’heure ? Le moment qu’il avait tant redouté ? Allait-il devoir prendre la Marque ? Son père était étrange, et son aspect général l’alarma immédiatement.
« Que s’est-il passé ? Tout va bien ? Mère va bien ? » Enchaîna-t-il comme un enfant.
Lucius ouvrit la bouche et chancela, son regard se voilant soudain. Il s’effondra sur l’un des fauteuils en face de celui du Directeur et il fixa longuement la lettre qu’il savait être de Narcissa, posée sur le bureau.
« Père, répondez ! Que se passe-t-il ?!
— Elle… elle est morte. »
Draco ouvrit la bouche d’horreur et sentit ses jambes se couper sous l’annonce. Slughorn s’affaissa sur lui-même, préférant ne pas intervenir. Il avait beaucoup aimé la petite Narcissa et son intelligence vive sous un sens de l’étiquette imparable.
« C-Comment… ?
— Il l’a tuée. »
Le Directeur attrapa la lettre dans un geste bien inspiré et la tendit à l’enfant qui se refusait à quitter des yeux son père.
« Je… je crois que c’est elle qui vous a écrit, Draco. »
Lucius hocha la tête sans pour autant oser regarder son fils, et Draco dû se faire violence pour baisser les yeux et reconnaître l’écriture de sa mère. Il décacheta la lettre. Un lourd silence tomba sur le bureau, à mesure de la lecture de l’enfant et des larmes qui tombaient lourdement sur le parchemin. Draco inspira plusieurs fois, renifla, et termina par la serrer contre lui, les yeux fermés. L’écho de la Chambre des Secrets lui parvint en tête et un bref instant une horrible culpabilité s’empara de son âme. Elle était morte. Il n’avait pu la sauver. Voldemort avait tué une autre mère, et il ne serait jamais plus le héros de personne. Lucius rompit le silence et se leva lentement, lui jetant un regard dur :
« Il viendra pour toi. Tu viens avec moi.
— Non, répliqua Draco en surprenant l’assistance.
— Non ?
— Non, répéta-t-il d’une voix rauque et déterminée. S’Il vient à Poudlard, prévenez la Brigade et Black, prévenez ceux qui s’opposent à Lui et affrontez-Le une bonne fois pour toute.
— Tu… Tu n’as aucune idée de ce que ta mère a fait. Tu ne sais pas la colère qu’elle a fait s’abattre sur nous !
— Ca n’est sans doute rien comparé à ce que j’ai fait, Père. Croyez-moi, j’ai fait mes choix, et ils ne vont pas davantage Lui plaire.
— Ce n’est pas un sujet à débat, Draco ! J’ai perdu ma femme, je ne perdrai pas mon fils !
— POURQUOI FAIRE ?! POUR PERDRE UNE NOUVELLE FOIS LA FACE EN TANT QUE MALEFOY ?! hurla soudain Draco. Tu crois que fuir va changer quoi que ce soit ?! Si on ne le détruit pas, il nous détruira nous ! Tu vas continuer longtemps à obéir ? À plier le genou devant devant un sale sang-mêlé ?!
— Comment tu sais que…
— Je sais tout ! Je sais ce que tu as involontairement commencé ! Je sais ce que moi j’ai décidé de faire. Je me fous de ta carrière, j’en ai rien à cirer d’un pouvoir qui s’évapore devant un fou. Je préfère mourir que de le servir, tu m’entends ?!
— Nous essaierons juste de vous permettre de ne pas en arriver là. »
La voix fit sursauter tout le monde et Lucius glapit en voyant Dumbledore au milieu de son portrait. Il l’observait d’un air pénétrant, et le blond eut l’envie contradictoire de lacérer le tableau et de fondre en larmes devant lui. Même s’il était mort, même s’il n’était plus qu’une croûte coincée dans un château, Lucius eu le sentiment d’être face à l’ancien Directeur, et cela le ramena des années en arrière, alors qu’il lui montrait d’un air accusateur le journal brûlé de Jedusor… l’Horcruxe de Voldemort par lequel tout avait commencé. La peinture sembla comprendre son cheminement mental, car Albus sourit d’un air triste :
« Je suis profondément désolé pour votre perte, Lucius. Votre épouse a fait le bon choix, et le bon n’est jamais le plus aisé…
— Vous nous avez piégés…, murmura Malefoy d’une voix absente. Si vous n’aviez pas…
— Oui, si je ne vous avais pas tenu au secret à propos de mon leg, si je vous avais pas obligé à vous taire sur les artéfacts dont j’ai doté Harry et Severus… si je n’avais pas protégé cette mission cruciale, vous n’auriez jamais pu comprendre et vous auriez toujours en votre possession cette coupe.
— Nous avions la coupe de Poufsouffle ?! s’éberlua Draco. Comment aurions-nous pu avoir deux… Oh… Bellatrix, s’interrompit-il. Quand elle est morte, Mère a hérité de… C’est de ça dont elle parle dans sa lettre. Oh… maman… »
Draco baissa la tête et s’autorisa à pleurer, chose que son père ne l’avait plus vu faire depuis de nombreuses années. Lucius s’avança maladroitement et le prit dans ses bras, enfouissant son visage dans la chevelure de son fils. Albus leur laissa une petite minute, puis il reprit la parole :
« Votre mère et vous avez beaucoup accompli pour lutter contre notre ennemi. Car il est notre ennemi à tous, désormais. Et votre père a probablement raison à propos de Sa venue prochaine. Phineas ? J’ose penser que vous avez été attentif tout ce temps ?
— Oui, ne vous en faites pas, Albus. Je vais les prévenir.
— Dites-leur de prévenir également Harry… bien qu’il doive très certainement le savoir, à l’heure actuelle.
— Qu’est-ce que Draco a…
— J’en ai détruit deux avec Londubat, coupa son fils.
— Deux ? Une coupe ? Bon sang, mais combien en a-t-il fait, intervint soudain Slughorn, livide.
— Vous saviez ?! s’écrièrent le père et le fils en même temps.
— O-oui… je… c’est à cause de moi s’Il…
— Il en avait déjà fait un durant sa cinquième année, Horace, coupa Albus abruptement. Il savait déjà comment faire, il ignorait cependant qu’on puisse le faire plusieurs fois.
— Peu importe combien, reprit Lucius. Tu viens avec moi.
— J’ai été très clair, répliqua le jeune homme. Et nous aurons besoin de toutes les meilleures baguettes pour le vaincre.
— Si tu meurs…
— Si je meurs et Lui non, votre vie ne tiendra qu’à un fil. Si je meure et Lui, oui, vous aurez toujours votre carrière. Et si en plus vous l’avez combattu, le poste de Ministre sera à vous.
— Mais que m’importe le pouvoir si les personnes que… »
Lucius se tut, se souvenant soudain qu’il n’était absolument pas seul avec son fils. Il se redressa d’un air digne et plongea son regard dans celui de Draco. Jadis, il lui suffisait de lever un peu le menton pour que son fils ne baisse la tête mais ce soir-là, alors qu’il venait tout juste de perdre sa mère, Draco montra pour la première fois le visage d’un homme adulte et déterminé. Le visage de l’héritier Malefoy qu’il avait tant espéré. Une vague de fierté mêlée à la crainte s’empara de lui et il expira longuement :
« Soit… Soit. Je reste avec toi. Nous L’attendrons ici. Horace, restez discret sur la question. Je vais emprunter votre cheminée. Jones et Lockbin sont de garde, il me semble, non ?
— Comment connaissez-vous les brigadiers en poste à la… Peu importe, oui. Je leur demande de se tenir sur leurs gardes ?
— Vous leur dites en substance que vous redoutez ce qui va suivre. Ce sont des jeunes sympathisants.
— Du Seigneur des Ténèbres ? s’inquiéta Draco.
— Non, de moi. Ils suivront les ordres sans discuter. Prévenez aussi les Professeurs Reser et Miskova que je désire m’entretenir avec eux. Pour Hide… Je devrai le rencontrer en dernier, mais la partie va être délicate.
— Lui il soutiendra clairement les Mangemorts, murmura Draco. Je dois prévenir Londubat. Je ne peux pas le laisser dans l’ignorance, il pourra nous être…
— NON ! Je refuse de te perdre de vue, tu…
— Je sais ce que je fais, père. Il n’y a pas que lui, je vais devoir trouver le moyen d’écarter certains élèves de Serpentard, également, termina Draco sombrement.
— Fais très attention à eux. Ne te fie à personne, Draco. À personne. Dumbledore ? Puis-je compter sur vous et vos… hommes ?
— Naturellement, Lucius. Nous sommes du même côté.
— Nos objectifs convergent, corrigea Malefoy en plissant des yeux. »
La peinture sembla ne pas s’y tromper et lui rendit son regard, malgré la présence d’un léger sourire. Draco fut frappé de la différence de traitement que le tableau faisait entre lui et son père et ça ne fit que renforcer sa détermination.
« De combien de temps disposons-nous ? demanda-t-il.
— Quelques minutes ? Quelques heures ? commença à répondre Albus. Horace, il y a fort à parier que cela soit vous la première cible de Voldemort. Peut-être exigera-t-il directement auprès de vous que vous lui donniez Draco.
— Ou bien le demandera-t-il directement aux élèves. Je suis suffisamment haï pour… »
Il ne termina pas sa phrase et hocha la tête en direction de son père, avant de redescendre immédiatement les escaliers pour contacter Neville.
***
Sirius sortit en trombes de son bureau pour aller dans sa chambre se changer. Il enfila une tenue de combat en cuir et ceint une ceinture contenant quelques anti-poisons et autres bricoles utiles. Hermione remercia le portrait du Directeur Black et se prépara également. Elle rassembla tout ce qu’ils possédaient en matière de décoctions et de poudres étranges et utiles des frères Weasley. Contrairement à Sirius, elle enfila un jean souple et un pull épais et proche du corps, une paire de gants en laine et chaussa des chaussures de courses qu’elle attacha avec grand soin. Elle se fit un chignon de ses cheveux et glissa sa baguette dans l’étui que Harry lui avait offert quelques années auparavant. Sirius les ferait transplaner quelques minutes plus tard devant les grilles, prêts à être cueillis par deux brigadiers complices à Poudlard.
***
« Plus que jamais, j’ai besoin de vous, Auror. Vous êtes mon meilleur élément. Vous avez été formée par le meilleur pour cette tâche. Je vous confie l’exécution de la défense de la contre-attaque. Préparez une offensive-surprise contre nos ennemis.
— Robards est au courant, Monsieur le Ministre ? demanda Tonks en haussa les sourcils.
— Il le sera. Vous avez carte blanche, Auror. Il vous prêtera main forte et sera sous vos ordres.
— Bien, je me prépare et rassemble mes troupes, en ce cas.
— Tonks ? appela Lucius en la fixant intensément. Votre époux pourrait nous être utile. Si vous jugez qu’il sera capable de se comporter en soldat sans penser à votre sécurité… considérez-le comme un de vos hommes.
— Il est mon homme, Monsieur le Ministre, répliqua Tonks d’un air entendu. »
Lucius se contenta d’hocher la tête et les flammes retrouvèrent un aspect normal. La jeune femme se tourna vers la porte et inspira longuement :
« Tu peux entrer. Je sais que tu as tout entendu. »
Rémus franchit le pas de la porte, une oreille à rallonge améliorée des frères Weasley dans la main. Il fixait sa femme d’un air grave.
« Nous y sommes ?
— Oui. Tu es prêt à te battre ?
— Bien entendu, je…
— Et à prendre le risque de me perdre ? le coupa-t-elle.
— Oui. Je sais que nous sommes en guerre. »
Elle le considéra longuement, comme ne croyant pas vraiment à sa lucidité sur la question. Rémus n’était pas un fou, mais il était naïf. Il était un homme qui voyait le bon partout, même dans les pires situations. Et les pires, justement, il n’y avait jamais assisté. Alors qu’elle…
« Soit. Prépare-toi, nous transplanons pour Pré-au-lard dans vingt minutes où la Brigade nous rejoindra. Tu assisteras au discours et au plan. »
Rémus opina du chef, avant de glisser un « à vos ordres » laconique. Il tourna des talons, puis s’arrêta soudain. Tonks qui était déjà en train de préparer la poudre de cheminette pour contacter les troupes écarquilla les yeux quand elle senti son mari la prendre par la taille et l’embrasser comme il ne l’avait plus fait depuis des semaines. Elle le fixa éberluée, comme si elle voyait pour la première fois depuis longtemps et, soudain, elle prit conscience qu’elle avait peur de le perdre.
***
Assis sur ce qui restait du canapé des Dursleys, Harry tenait fermement la main de Luna, gardant les yeux fermés. Severus s’était mis à genoux face à lui, baguette tirée au besoin, et Jane guettait leur attitude générale, la batte de baseball que Dudley avait cassée des années plus tôt sur la poubelle d’un voisin dans les mains.
« Inspirez longuement, puis, quand vous serez prêt, concentrez-vous jusqu’à vous persuader que vous plongez à l’intérieur de Sa tête. Imaginez-vous glisser dans Sa peau avec la plus grande discrétion, comme si vous ne vouliez pas froisser un vêtement, ou corner les pages d’un livre. »
Harry tenta de s’imaginer les choses, en ayant la désagréable impression d’être ridicule, mais soudain, il eut la sensation de plonger dans une eau glacée avec un étrange courant bouillonnant.
« Je suis… je suis dans un lac, je crois, murmura-t-il comme il put.
— Très bien, vous y êtes, visualisez Luna comme une arbre sur la berge auquel vous allez vous accrocher pour avancer. Ne vous laissez pas emporter par le courant, mais suivez-le naturellement. Il ne doit pas remarquer votre présence, soyez léger et discret.
— Je fais ce que je peux…
— Vous vous en sortez très bien, se permit Jane. »
Severus hocha la tête, comprenant que l’enfant avait davantage besoin d’encouragements positifs. Harry serra plus fort la main de Luna et suivit le mouvement, ayant l’impression de flotter dans une eau intense et corruptrice. Puis, quand il sentit qu’il était au bon endroit, il s’accrocha plus fort encore, et plongea mentalement sous la surface. Son corps se raidit instantanément et ses yeux s’ouvrirent dans le vide.
« Il y est, commenta Severus. Observez, écoutez. Vous nous direz plus tard. Luna, serrez en retour, si vous sentez à un moment qu’il s’éloigne…
— Je le repêche comme un miraculé, termina-t-elle tranquillement. »
Le silence était total autour de Harry, durant quelques secondes, il eut l’impression d’être entré dans un profond sommeil dont il serait conscient. Quand, soudain :
« Greyback et sa meute nous rejoignent comme prévu, Maître.
— Très bien, de combien de loups dispose-t-il ?
— … cinq, Maître. Et ils ont l’air fraîchement mordus. Je crains que Fol’Oeil ne nous fasse chier, jusque dans sa tombe.
— Es-tu nerveux, Joseph ? Tu es bien vulgaire, et tu sais que j’ai horreur de cela. »
Harry fixa Joseph Abernathy avec l’impérieuse envie de le torturer. Son bras droit le démangeait atrocement et le bourdonnement à ses oreilles l’agaçait comme jamais. Quelque chose avait changé depuis qu’un de ses Horcruxes avait été détruit. N’était-ce qu’un seul Horcruxe, d’ailleurs… ? Les lèvres d’Abernathy bougeaient, mais il n’entendait rien, ça propulsa sa rage à un stade supérieur :
« VA-TU T’EXPRIMER DE FACON INTELLIGIBLE ?! »
Le Mangemort se tassa sur lui-même, les yeux éberlués, comme incapable de comprendre ce qu’il avait fait de mal. Il était stupide, de toute façon, Lucius l’avait dit lui-même… Lucius… À cette seule pensée, Harry se leva d’un bond et pointa sa baguette sur le pauvre sorcier qui se jeta à ses pieds :
« Mon Seigneur, je sais que c’est une catastrophe, mais ils n’ont rien voulu savoir ! Nous avons même perdu…
— Qui « ils » ?! s’arrêta soudain Harry en plissant des yeux.
— Les… les géants, Maître. Ils… ils refusent de nous rejoindre cette fois, ils disent qu’ils ne sont pas nos créatures.
— QUOI ?! »
Harry lança le sort de torture et ricana de satisfaction, cherchant par tous les moyens à avaler la douleur de sa proie pour calmer la sienne.
« C’est normal son sourire malsain, là ? » Demanda Jane en levant la batte de base-ball.
Snape s’approcha doucement et toucha le front de Harry qui était brûlant. Ses yeux étaient révulsés et son expression terrifiante. Luna secoua la tête :
« Il me broie les doigts. Je ne sais pas ce qu’il voit, mais ça l’emporte au fond, je crois.
— Tenez-le à deux mains, s’il faut, il ne doit pas se noyer. »
Harry se rappela de justesse qu’il ne devait pas tuer son Mangemort. L’attaque était imminente et il aurait besoin de toutes les ressources possibles pour s’en prendre à Poudlard. Il arrêta le sort et ordonna d’une voix rendue sifflante par l’effort :
« Va. Nous partons dès que tout le monde est rassemblé. Dis-leur que nous attaquerons de front dès que j’aurai eu ce que je suis venu chercher.
— Maître… ? Qu’allez-vous chercher à Poudlard ? se risqua Abernathy qui ne comprenait pas un traître mot du raisonnement du Mage Noir.
— Le destin. »
C’était évident, pourtant. Harry sourit d’un air satisfait, repassant en mémoire l’ordre d’attaque qu’il allait donner. Poudlard tomberait une nouvelle fois, et cette fois-ci, il détruirait Harry Potter.
Luna se leva d’un bond en tirant Harry par la main, elle le tira si fort que le garçon se leva à son tour du canapé et tomba à la renverse. Quand il atterrit sur son amie, les yeux grands ouverts, le front perlé de sueur, il s’exclama :
« Il a perdu l’esprit. »
Harry se releva péniblement, une horrible envie de vomir accrochée aux lèvres.
« Je ne l’avais jamais vu comme ça. Il est incohérent, ses émotions sont vives et ne cessent de changer, ses pensées. Par Merlin, c’est un bordel sa tête !
— La perte de ses morceaux d’âme l’affecte plus qu’Albus ne l’imaginait. Il ne lui en reste que trois, il y a fort à parier que lorsqu’on aura détruit le serpent, il soit plus facile…
— Nagini sera là, coupa Harry. Et Greyback, et toutes leurs recrues, il y aura quelques détraqueurs, s’Il arrive à les contenir dans son état. Les élèves vont être utilisés en « cheval de Troie », termina-t-il en mimant les guillemets.
— Il a pensé à cette histoire ? compris Jane.
— Et Il en est fier, confirma Harry. Je crois… Je crois qu’on peut y arriver Son plan est…
— Fou. Tout comme lui. Jane, envoyez les informations à Black et Granger. Potter, allez vous laver, Lovegood, vous prendrez la suite, et nous après. Nous allons nous préparer, nous retournons à Poudlard.
— On transplanera ?
— C’est le plus simple.
— Tous les quatre… ? »
Harry pris Luna par la main et l’invita à le suivre à l’étage, se moquant apparemment de l’ordre établi par Snape. Severus lança un regard perçant à Jane et hocha lentement la tête :
« Vous préférez nous attendre sagement ici ?
— Non. Je serai incapable d’attendre de voir si vous allez revenir. Et je veux me battre. Je ne sais juste pas trop comment.
— Vous n’y avez jamais songé ?
— Quoi ? Vous croyez que je vais sortir du sac magique une kalash et trouer tous les sorciers à portée ? Et je l’aurais achetée comment, eh ?
— Dimitri…
— Dimitri a beau avoir l’air d’un espion russe au service du Kremlin, ses réseaux et magouilles ne vont pas jusque-là. J’aurais pu nous avoir de la drogue, mais pas des armes. Je n’ai qu’un spray au poivre, sourit pauvrement Jane en le sortant du sac.
— Et vous l’avez vraiment embarqué tout ce temps avec nous… Vous irez avec Pompfresh gérer les blessés, en ce cas. Ça sera toujours utile.
— Ouais, on verra sur place, donc. J’évite les gens qui me connaissent et je rase les murs, je connais.
— On ne vous reconnaîtra pas facilement. Pas plus que moi, Potter ou Lovegood. Grâce à vous, nous avons un léger avantage dans cette attaque. »
Jane lui sourit d’un air entendu et fouilla à nouveau dans le sac pour tirer l’épée de Gryffondor.
« Au pire, dit-elle. Je peux toujours me servir de ça, non ?
— Vous savez manier l’épée ?
— J’ai eu une initiation à l’escrime quand j’étais môme… »
Snape leva les yeux au ciel et prit le sac de ses mains, avant de tirer la cape d’invisibilité de Harry et de la lui tendre :
« Glissez-vous dessous, ça me semble être autrement moins hasardeux.
— Donc, je viens ?
— Mourir à deux sur le champ de bataille n’est-pas une fin digne d’un de vos romans à l’eau de rose ?
— Austen marie ses personnages à la fin de ses histoires, elle ne les exécute pas.
— De mon point de vue, c’est du pareil au même. »
***
Draco descendit directement aux jardins de Serdaigle et une fois qu’il fût certain qu’il était seul, appela d’une voix incertaine :
« Dobby… ? »
Il attendit une petite seconde avant que l’elfe n’apparaisse et lui jette un regard inquisiteur. Le blond hésita, puis se lança :
« Je dois prévenir Neville pour ce qui va suivre, il faut qu’il organise les Gryffondors et tous ceux qui voudront bien se battre. Peux-tu le… heu.. faire venir ? Hum… s’il te plaît ? »
Dobby sourit légèrement et hocha la tête, l’instant d’après, Neville Londubat se tenait à sa place, un livre à la main.
« Que se passe-t-il ?
— Il va attaquer. Mon père est en haut avec Slug et Dumbledore. Ils sont en train de rassembler tout le monde pour lui faire face.
— Mais… que s’est-il passé ? Il s’est rendu compte de ce qu’on faisait ?
— Oui. Oui, et Il a déjà commencé à purger les traitres.
— Purger ?
— Ma mère… »
Draco n’arriva pas à terminer sa phrase et se racla la gorge avant de reprendre.
« Tu dois préparer les autres. Moi je vais… Je sais pas. Rassembler les Serpentards qui ne sont pas dangereux, je crois.
— Il y a quelques premières années qui avaient joué le jeu avec Snape lors de la précédente attaque. Ceux qui étaient encore à l’école pendant les vacances, proposa Neville en s’approchant.
— Bien, je vais les contacter discrètement et leur dire de… qu’est-ce que tu t’apprête à faire, au juste ?
— Tu as l’air bouleversé.
— Garde ta main loin de mon épaule, je n’ai pas besoin de ta sollicitude. C’est la guerre, les gens y meurent, non ? »
Neville pinça les lèvres et secoua la tête.
« Soit, fais le fier Serpentard. Sache que je te présente néanmoins mes condoléances.
— Tu le feras en tant que Lord quand on pourra lui organiser de vraies funérailles. T’as plus urgent à faire, bouge-toi Londubat. »
Draco ne lui laissa pas le temps de répliquer qu’il descendit les escaliers pour se rendre à la salle commune. Comment allait-il pouvoir éviter les autres apprentis-Mangemorts… ? Quand il arriva dans les cachots, l’ambiance était fébrile, beaucoup trop pour une simple soirée. Son entrée fut fortement remarquée, et il se raidit immédiatement quand le caquètement de Pansy le stoppa dans son mouvement.
« Tiens, tiens… Quand on parle du loup… ou plutôt devrais-je dire du petit serpent vicieux. Jamais aux repas, toujours à l’heure pour braver le couvre-feu. »
Draco inspira longuement, cherchant une excuse pour sa nouvelle absence au banquet, mais Pansy enchaîna :
« Tu savais que Monsieur-ton-père était à Poudlard ? »
Draco plissa des yeux froidement, saisissant l’occasion au vol. Lucius n’était pas encore en disgrâce, pour autant qu’elle soit si jalouse qu’elle en devenait méprisante, Parkinson n’oserait pas aller trop loin.
« Je n’ai pas dîné avec vous et le Ministre de la Justice, qui se trouve être également mon père, est dans nos murs. À ton avis, Parkinson ? Quelqu’un peut-il lui expliquer la logique la plus élémentaire ? Car, je suis épuisé de sa stupidité. »
Elle s’empourpra, sous les ricanements bovins de Crabbe et Goyle, et Zabini en profita :
« Il est train de dire qu’il a dîné avec son père.
— JE LE SAIS ! cria Pansy, livide. Vous vous complétez bien tous les deux. A faire vos cachotteries, parfois ensemble…
— Tes fantasmes nous lassent, Parkinson, coupa Draco en quittant la pièce. Vous devriez vous calmer, tous. Le Ministre de la Justice pourrait bien visiter la salle commune pour s’assurer que vous êtes à la… hauteur, des attentes de vos aînés. »
La menace fit mouche, et Draco pu confirmer d’un rapide coup d’œil quels étaient celles et ceux qui étaient marqués, sympathisants, ou tout simplement apeurés par cette possibilité aux gestes que certains pouvaient avoir en direction de leur avant-bras. Il fallait jouer très serré. Combien de temps avant que Voldemort n’arrive et ne réclame sa tête, faisant valser au passage celle de son père… ? Il fit mine de se retirer dans ses appartements de préfet, et attrapa par le bras Zabini qui passa pour l’enfermer dans la salle de bain. Le brun l’observa avec un sourire narquois plaqué aux lèvres :
« Parkinson trouverait à redire à ce genre de choix de lieu.
— C’est pas le moment. Il va attaquer. D’une minute à l’autre, Il va venir pour me tuer, tuer ses opposants, tuer Potter s’il se ramène comme prévu. »
Blaise cligna des yeux lentement, traitant l’information comme il le put. Il ouvrit la bouche un certain nombre de fois, avant de s’approcher de Draco jusqu’à ce que ses yeux ne soient plus que ce qu’il pouvait voir.
« Qu’est-ce qui se passe ?! Qu’est-ce que tu as fait ?!
— Ce qu’il fallait faire pour S’en débarrasser.
— Mais tu es complètement…
— Est-ce que tu es avec moi ?
— Quoi ?!
— Est-ce que tu es avec moi, Blaise !? »
Zabini écarquilla les yeux, tout air cabotin ayant quitté son visage. Il sembla prendre cette décision et annonça :
« Oui. Tant que tu le souhaites, oui. »
Draco fronça les sourcils, incertain de comprendre ce qu’il entendait par là et lui serra la main.
« On doit choper les petits qui sont récalcitrants. Les sangs-mêlés, les nés-moldus aussi… Tous ceux qu’on doit sortir de là avant qu’Il n’arrive et que Serpentard ne devienne un véritable piège à gnomes… Parce que dès qu’Il sera là, les autres vont s’en donner à cœur joie.
— Je m’en charge. Retourne auprès de ton père, ne reste pas aux cachots.
— Parkinson…
— Est une imbécile que je peux gérer. Mets-toi en sécurité. »
Draco lui serra la main une nouvelle fois, et hoqueta quand Zabini l’étreignit épaule contre épaule, en lui donnant une tape franche dans le dos. Le brun lui glissa à l’oreille « Et n’oublie pas ta promesse… », juste avant de le repousser.
***
Remus observa le masque blanc que sa femme lui tendait. Contrairement aux Mangemorts qui arboraient des masques aux motifs uniques et stylisés, ceux de la Brigade étaient identiques. Le mettre était renoncer à son identité, devenir une baguette anonyme au service du Ministère… ou plus précisément du Ministre de la Magie comme Rémus l’avait parfaitement compris. Il jeta un regard aux alentours : les hommes et les femmes s’étaient coulés dans leur rôle juste après le discours et tenaient chacun leur baguette dans leur main, attendant le signal de leur nouveau Commandant. Tonks portait l’exacte même tenue que ses autres coéquipiers, mais il n’était pas difficile de la reconnaître : sa posture était déterminée, sa stature haute malgré sa petite taille. Remus la fixa un bref instant, conscient que le regard de sa femme était tourné vers lui. Elle n’attendait qu’une chose : qu’il obéisse. Il plaça lentement le masque sur son visage.
***
L’image solide du château s’imposa à eux et son immense silhouette qui se découpait dans les ténèbres leur tira un fort sentiment de nostalgie. Harry cligna des yeux, sentant une légère vague de tristesse l’envahir alors qu’il trouvait la bâtisse hostile. Luna releva son col roulé en jetant un regard sévère à la structure. Le souvenir de Dumbledore s’imposa brutalement à Severus qui serra sans s’en rendre compte Jane contre lui. Quant à Jane, elle murmura, surprise :
« Je peux toujours le voir.
— Intéressant…
— Mais comment cela se peut-il ? s’éberlua Harry. Vous n’êtes ni enseignante ni Sorcière, vous…
— Elle est venue protéger Poudlard et son héritage. C’est normal que le château laisse faire, vous ne pensez pas ? »
Jane sourit tendrement à Luna, mais son visage retrouva immédiatement après l’expression qu’elle avait eu la nuit de Noël.
« Combien de temps avant que Black et… »
Un pop coupa Severus et Hermione et Sirius apparurent soudain. Hermione se précipita et étreignit Harry, puis Luna avec émotion, avant de sortir rapidement la carte du Maraudeur et de la pointer de sa baguette.
« On va entrer par là et trouver Neville et les autres, expliqua-t-elle. Il va te falloir un peu de temps pour attirer son attention. Nous devons faire en sorte de le séparer de son serpent pour ensuite que tu puisses… eh bien… »
Elle jeta un regard incertain à Harry qui la considéra gravement. Le brun écarquilla soudain les yeux quand il vit l’expression terriblement triste de son amie. Elle avait compris. Hermione comprenait toujours tout.
« Oui, dit-il lentement. Pour que j’accomplisse la prophétie. »
Sirius grogna mais retint sa langue, posant simplement une main protectrice sur son épaule. Harry comprit qu’Hermione l’avait tenu au secret, et il remercia mentalement son amie pour cela. Il les regarda tour à tour et soupira :
« Vous êtes sûrs de vous ? »
Luna lui sourit en retour, Snape leva les yeux au ciel, Sirius et Hermione hochèrent la tête et Jane le fixa sans rien dire. Harry se racla la gorge.
« Je n’aime pas faire de discours. Et vous n’en avez de toute façon pas besoin. Cette nuit, nous mourront très probablement. En tant que traître, en tant qu’enfant, en tant qu’opposant, en tant que Moldu… Parce que nous nous battons contre quelque chose qui veut détruire ce que l’on aime. Qui nous a déjà tant pris. Mais nous prenons ce risque pour voir un monde meilleur survenir. Pour qu’une aube se lève sur un avenir. Peut-être pas pour nous, mais pour les gens que nous protégeons. Ces personnes que nous aimons. Nous nous battons pour que d’autres n’aient plus à le faire. »
Hermione, Sirius, Luna et Jane lui sourirent avec émotion. Snape renifla et répondit lentement :
« Si vous mourrez, assurez-vous que le maximum d’ennemis vous suive. »
***
Poudlard était vivant. Élèves et Professeurs pouvaient l’attester. Dans chaque pierre, chaque couloir, chaque gargouille, la magie pulsait intensément, emmagasinée pendant des siècles depuis que ses fondateurs l’avait érigé. C’était un rythme lent, une vibration constante qu’on pouvait percevoir si on y était suffisamment attentif. Une impression d’un second cœur plus facilement identifiable dans les cachots, et plus encore dans la Chambre des Secrets. Chaque habitant de l’école, s’il le souhaitait, pouvait entendre vivre le château. Alors, quand soudain l’air devint épais. Quand un silence terrifiant s’abattit sur l’ensemble de ses occupants. Quand plus une âme, qu’elle fut de ce monde ou de l’autre n’osa parler, bouger, respirer. Chacun et chacune eut l’intime conviction que quelque chose de grave allait se produire. Les premiers à réagir furent celles et ceux qui avaient assisté à l’attaque pendant les vacances, mais ils n’eurent que le temps de sortir leur baguette. Un bourdonnement sourd remplaça ce cœur vivifiant, un bourdonnement terrible, comme le sifflement rageur d’un serpent en train d’agonir. Il s’infiltra dans la pierre, rampant sur les murs comme du lierre pourrissant. Il les fit tous frissonner, s’insinuant dans leur esprit et les empoisonnant d’une seule idée fixe.
Malefoy. Draco Malefoy. Il voulait Draco Malefoy. Ils devaient offrir Draco Malefoy.
***
Le regard de Blaise s’arrêta immédiatement sur Mc Laughlin qui pâlissait à vue d’œil. Il vit le jeune Serpentard regarder légèrement à sa droite, et Zabini n’eut pas besoin de se retourner pour comprendre sa peur. Il ferma brièvement les yeux, puis soupira :
« Nous y voilà… Tu auras finalement ce que tu voulais, Parkinson. Quoi qu’à la vérité, non… Ce que tu voulais était en réalité au-delà de ta portée. »
Il se retourna lentement, tirant sa baguette.
« Nous sommes trois, Zabini. Quatre si je compte Mc Laughlin bien qu’il soit encore jeune. Mais il n’est pas stupide, n’est-ce pas, Matthew ?
— Je suis un Serpentard, répliqua le cadet sombrement. »
Zabini prit une profonde inspiration en maugréant mentalement contre Draco. Il passait trop de temps chez les Gryffondors pour croire un seul instant qu’un membre de leur maison serait assez fou pour s’opposer à Lui. Matthew, comme les autres, étaient leurs ennemis. Leurs ennemis… comment avait-il pu laisser ses émotions prendre le dessus, au point de se retrouver jeté dans la même fosse que Malefoy ? Il passa rapidement en revue ses options et comprit à l’expression de la jeune fille qu’aucune de ses ruses pour se tirer de là ne leur ferait jamais croire qu’il livrerait son ami. Quel imbécile !
« Tu vas nous dire où est Draco ! menaça-t-elle en s’approchant lentement.
— Non.
— Non ? Tu crois qu’on va hésiter une seule seconde à te faire du mal ? cracha Nott. Tu nous as pris pour quoi ? Tu sais qui on est ?
— Des abrutis, répliqua Zabini d’un ton calme.
— Répète ! grogna Crabbe.
— Vous êtes des abrutis. Des abrutis qui ploient le genou, qui plus est. Un Poufsouffle ne serait pas aussi pathétique…
— Ferme-la ! Je t’ai dit de nous montrer où est Malefoy ! Où se cache-t-il ? Dans votre petite pièce secrète d’amoureux ?! Hein ?! »
Crabbe pouffa bêtement de rire, alors que Nott fronça les sourcils avant de grimacer de dégoût. Zabini observa le visage de Pansy et un léger sourire moqueur s’étira sur ses lèvres.
« Alors c’est ça… Je me demandais pourquoi soudain tu le haïssais. Pourquoi tu ne minaudais plus stupidement dès qu’il ouvrait la bouche. Pourquoi tu ne le suppliais plus de t’emmener aux soirées mondaines… Il ne s’agit que de ça.
— Ferme-la, qu’est-ce que tu racontes au juste ? La seule chose qui m’intéresse est de savoir où il se terre. Si le Maître le veut, alors Il l’aura !
— Ce n’est pas ce qui t’obsède, répondit toujours aussi calmement Zabini en remontant sa manche sur sa baguette cachée dans sa chemise. Tu ne cesses de parler de ça. Serais-tu horrifiée qu’il puisse préférer passer du temps avec un homme qu’une poignée de secondes avec toi ? »
Pansy accusa durement le coup et l’observa comme s’il l’avait giflée. Blaise ricana alors que Nott secoua la tête :
« On s’en fout de ces conneries. S’il est un déviant, le Maître le punira lui aussi, on les livre tous les deux ! »
Pansy cilla puis un sourire mauvais apparu sur ses lèvres :
« Excellente idée. Vous êtes si inséparables que vous devriez adorer l’idée de mourir ensemble… n’est- pas… romantique ?! cracha-t-elle presque.
— Non, murmura Zabini, poursuivant son raisonnement. Ce n’est pas tant du dégoût… que de la jalousie. »
Pansy écarquilla les yeux et leva la baguette, son visage se tordant dans une expression de rage.
« LA FERME ! LA. FERME ! Où est Malefoy ? PARLE !
— Je te conseille de bien prendre conscience de la situation, ajouta Mc Laughlin en pointant sa baguette contre sa nuque.
— Je te l’ai dit, je ne sais pas. Il n’y a jamais eu de « pièce secrète d’amoureux », s’amusa Zabini.
— Tu finiras bien par me le dire d’une façon ou d’une autre, gronda-t-elle en se pourléchant les lèvres. J’aurai ce que je veux.
— Non, sourit encore une fois le brun en la toisant avec mépris. Non, et c’est ça qui t’obsède. Tu n’es pas seulement une femme, Parkinson. Tu es stupide. Et la stupidité tue chez les Serpentards… AVADA KEDAVRA ! »
Pansy écarquilla une dernière fois les yeux, en voyant la baguette de Zabini dépasser légèrement de sa manche et être pointée vers son ventre. Elle fut projetée en arrière et retomba sur le sol, bouche-bée. Crabbe ouvrit la bouche, profondément choqué et incapable d’intégrer ce qu’il venait de se passer, mais Nott répliqua immédiatement avec le même sort. Zabini s’apprêta à repousser Mc Laughlin mais ce dernier le tira par le bras et l’entraîna à l’extérieur, lança d’un rapide coup de baguette un des fauteuils de la salle commune qui prit le maléfice à la place. Ils s’enfuirent dans les couloirs à toute allure.
« Qu’est-ce que tu fais ?! cria Zabini en montant remontant les marches en direction des étages supérieurs. Je croyais que tu…
— J’ai dit que j’étais un Serpentard ! Va chercher Malefoy, je m’occupe de vérifier que les autres sont en sécurité.
— Alors vous allez vraiment…
— Nous l’avions dit au Professeur Snape. Nous sommes fidèles à notre maison. Maintenant, va et méfie-toi des élèves des autres maisons. Personne n’aime ton petit prince blond. »
***
Aux abords de Poudlard, Voldemort fixa le château de ses yeux écarlates et hésita un bref instant à lever sa baguette. Il n’avait aucune patience, il voulait Malefoy. Il voulait Malefoy et le voulait sur le champ. Un Mangemort s’approcha de lui, suivi de près par un élève de sixième année apparemment impressionné. Il portait une robe à l’écusson vert et s’agenouilla en tremblant. Voldemort renifla d’un air de dédain.
« M-Maître…
— Qu’est-ce que tu me ramènes-là, Avery ?
— Un élève de Serpentard qui dit avoir des informations pour vous, Mon Seigneur.
— Je n’ai pas demandé d’informations. J’ai demandé qu’on m’apporte Draco Malefoy ! siffla Voldemort en sentant la rage s’emparer une nouvelle fois de lui.
— J-justement, Maître, balbutia l’enfant. Il… il est introuvable… Mais ! » Ajouta-t-il précipitamment en voyant le Mage Noir ouvrir la bouche dans une expression terrible. « Mais son père… Lucius Malefoy est dans le château.
— Où ?!
— A-Avec le Directeur… Il avec Slughorn.
— Quel est ton nom ?
— Nott, Monseigneur, je fais partie de vos Mangemorts marqués…
— Nott, coupa Voldemort d’un air appréciateur. Rassemble tes amis et prépare-toi à monter à la tour du Directeur avec moi.
— O-oui… C’est un honneur, Monseigneur !
— Avery ! coupa une nouvelle fois le Mange Noir. Donne-moi ton bras. Il est temps. »
***
Severus releva immédiatement la tête et observa Harry intensément. Ils se tenaient dans un des couloirs reliant deux passages secrets, s’éclairant de leur seule baguette. Le jeune homme s’humecta les lèvres :
« Je l’ai senti. Il est fébrile.
— Il nous appelle. »
Snape remonta sa manche et dévoila sa marque noire qui le brûlait atrocement. Il garda les yeux rivés sur Harry, attendant la suite.
« Tous. Il vous appelle tous. Il va attaquer.
— Il lance l’assaut, comme ça ? À l’aveugle ?!
— Il croit qu’Il a déjà gagné. L’école Lui appartient… murmura Severus.
— Non, sourit soudain Harry d’un air goguenard. Techniquement… elle est aussi à moi… »
Jane posa sa main sur la marque des ténèbres tatouée et remit en place la manche d’un geste ferme.
« Alors donnez-nous le signal, Harry. On s’occupera du reste.
— Quand Il sera là, répondit le jeune homme. Quand Il sera entré et que je saurai où est sa bestiole… vous frapperez. »
***
Les jeunes recrues Jones et Lockbin étaient de bons éléments de la Brigade. Prometteurs. Mais, nous l’avons dit : jeunes. Ils ne prirent garde aux élèves qui passaient nonchalamment dans le hall, et ce malgré le couvre-feu. Trop occupés à garder les yeux en direction du pont qui gardait l’entrée principale de Poudlard, ils ne virent pas les deux traits verts qui fusèrent dans leur direction, envoyés depuis des baguettes encore tremblantes de Serpentard. Le plus jeune assassin gémit et vomit presque immédiatement, tandis que le plus âgé s’avança vers les portes et les ouvrirent. Voldemort suivi d’Abernathy, Greyback et un troisième Mangemort encapuchonné passèrent sans même leur accorder un regard.
***
Cette fois, aucun Professeur n’était venu sonner l’alerte. L’ennemi était entré sans encombre et seuls les Serpentards zélés de Voldemort déambulaient dans les couloirs. Les Professeurs furent amenés un à peu dans la Grande Salle, comme la fois précédente, alignés par Greyback qui dardait un regard chargé d’appétit sur les rescapés de la dernière attaque. Mme Pomfresh sanglota doucement, le souvenir encore vif et douloureux de l’exécution de ses amis en mémoire. Voldemort monta directement au bureau du Directeur, flanqué d’un Abernathy qui jubilait. La porte du bureau s’ouvrit avant même qu’il ne l’exige, dévoilant Horace Slughorn blanc comme un linge, assis à son siège.
« Bonsoir, Professeur… » siffla Voldemort avec satisfaction.
***
« A deux mètres de la gargouille ! s’exclama Harry. Le serpent est seul accompagné de deux Mangemorts. Allez-y ! Sirius, préviens Rémus qu’ils sont tous entrés. Greyback est dans la Grande Salle, les élèves sont disséminés… Non, Professeur Slug…
— Potter ? interrogea Snape d’une voix inquiète.
— Il… Il n’a pas trouvé Draco, alors Il a…
— Tout le monde paie ses crimes, je suppose, répondit l’ancien Mangemort d’un air sombre. Nous n’avons plus de temps. Smith, sous la cape, direction l’infirmerie…
— C’est hors de question, coupa-t-elle. On a un serpent à tuer, et vous n’allez certainement pas vous en charger seul alors que ça grouille de types qui veulent votre peau.
— Vous… Soit, capitula-t-il en voyant son expression se durcir. Mais ne vous avisez pas d’être un fardeau. Lovegood et Granger, vous allez récupérer Londubat et Malefoy Jr. Black, retrouve Lupin et Tonks. Chargez-vous des adultes. Potter… Il est temps de sortir le grand jeu. »
***
Rémus suivit la troupe qui se déplaçait silencieusement en direction de Poudlard. Le château semblait encore endormi et rien ne laissait présager qu’une attaque était en cours. Le miroir dans sa poche chauffa et il le tira discrètement pour voir le visage de Sirius apparaître :
« Allez-y, ils sont en sous-nombre dans la Grande Salle. »
Rémus levant les yeux vers Tonks qui l’observait et qui leva le bras silencieusement et l’élança devant elle. Comme un seul homme, la Brigade fondit en direction de Poudlard.
***
Il ne fallut guère de temps aux deux jeunes filles pour remonter en direction de la Chambre Commune. Le portrait leur ouvrit le passage de bonne grâce, et une poignée de minutes plus tard, les Gryffondors étaient réunis autour de l’elfe de maison venu avertir Londubat.
« Dobby, préviens les préfets de Poufsouffle et Serdaigle. Que les élèves qui veulent se battre viennent et que les autres restent profondément cachés dans leur salle commune ! Ginny, récupérez les équipements de Quidditch, que les équipiers et spécialement les batteurs soient en capacité de déchaîner les cognards dans la Grande Salle. Seamus et Dean, vous avez bien compris comment utiliser les boîtes des frères Weasley ?!
— Oui ! répondirent-ils en chœur.
— Bien. Hermione, Luna, vous m’accompagnez aux jardins de Serdaigle. Je pense que notre allié s’y trouve. Aller tous, vous avez vos ordres ! » Termina Neville en levant la baguette.
Les Gryffondors et l’elfe de maison crièrent comme une armée et Hermione cligna des yeux, se souvenant du petit garçon potelé qu’elle avait pétrifié quelques années plus tôt.
***
Les premiers à frapper furent les Brigadiers. Les portes de la Grande Salle s’ouvrirent à la volée pour déverser d’épaisses traînées blanches dissimulant les sorciers et sorcières du Ministère. Les Mangemorts et les loups-garous, les élèves passés à l’ennemi envoyèrent immédiatement des maléfices et rapidement, le ciel magique se mit à gronder. Tonks décrivit un demi-cercle de sa baguette et lorsqu’elle apparut au milieu des tables, devant les Professeurs agenouillés, une langue de feu s’éleva entre elle et les loups-garous. Elle fixa de son masque Greyback et pointa le bout de sa baguette face à lui :
« À nous deux, chien. »
***
Severus fonça en direction de l’étage où se trouvait le bureau du Directeur. Les portraits mirent quelques marches avant de le reconnaître et de murmurer son nom d’un air effaré. Jane suivait péniblement sous la cape, son souffle se perdant dans la précipitation. Ils déboulèrent sans discrétion à l’étage avant qu’un terrible sifflement les arrête nets. Face à eux se dressa lentement un immense serpent dont le regard restait fixe sur Severus.
Soudain, sa marque des ténèbres le brûla comme le soir de la mort de Bellatrix. Deux Mangemorts se dévoilèrent et l’un d’eux ricana :
« Voici le traître qui bientôt sera puni.
— Thorfinn, reconnut Severus d’une voix neutre. Et je suppose Travers. Vous jouez les gardes-ménageries, maintenant ? A moins que cela ne soit cette bête qui vous garde de moi. »
***
« Londubat ? Lovegood ? Granger ?! Qu’est-ce que vous foutez-là ? Depuis quand ces deux sont de retour ?
— Zabini… murmura doucement Neville en levant sa baguette dans sa direction. Qu’est-ce que toi tu fais ici au lieu d’être avec les autres Serpentards dans la Grande Salle ? »
Plantés au milieu des couloirs, ils s’observèrent avec méfiance. Le Serpentard n’avait aucune raison de traîner à l’étage de la Salle Commune des Gryffondor, à moins que…
« Tu as dit à Malefoy de trouver ceux de notre maison qui allaient aider, non ?
— Que fais-tu ici, répéta Neville d’un air suspicieux.
— Il le cherche, comprit Luna en choquant le Serpentard. Il a peur pour lui, je crois.
— Comment tu… ?
— Suis-nous. »
Neville ne lui laissa pas le temps de répondre qu’il bondit en direction des jardins, jusqu’à y arriver prudemment, baguette levée.
« Tu es prêt ? demanda-t-il à l’arbre.
— Tu es seul ? répondit l’arbre avec la voix de Draco.
— Non. Pas plus que toi, désormais. »
Le blond descendit lentement le long d’une branche, fixant Blaise avec insistance :
« Tu as pu contacter ceux qui pourraient se retourner contre Lui ?
— Oui. Mais on a les autres à nos trousses. Parkinson est morte.
— Comment ?
— Je l’ai tuée. » répondit Blaise en le fixant intensément.
Draco ouvrit la bouche, profondément choqué et recula involontairement d’un pas. Hermione plaça sa main devant sa bouche, horrifiée, tandis que Luna sembla ne pas faire grand cas de cette nouvelle. Neville secoua doucement la tête :
« Je suppose que tu n’as pas eu le choix.
— Si. Mais faire autrement aurait été stupide et dangereux.
— Tu… tu l’as tuée… comme ça… ? balbutia Draco.
— Je ne suis pas un Mangemort, Draco. Mais je ne suis pas quelqu’un de doux pour autant. Pas avec mes ennemis, du moins.
— Ca n’a aucune importance pour l’heure, Malefoy, où se trouve ton père ?
— Avec le Directeur.
— Il est en grand danger, alors. Nous avons encore une chance d’aller l’aider, coupa Neville en hochant la tête.
— Potter est avec vous ? demanda Draco, soudain.
— Il frappera au moment opportun, c’est entre lui et Voldemort, répondit Luna très sérieusement.
— Dommage. Le Seigneur des Ténèbres m’avait spécialement demandé de le lui apporter. »
Les Gryffondors tressaillirent et se retournèrent pour faire face à une poignée de Serpentards menés par un Mangemort encapuchonné. La voix leur était trop familière pour qu’ils puissent l’ignorer, et Hermione déglutit péniblement en tirant lentement sa baguette. Une main de métal abaissa lentement la capuche pour dévoiler une touffe de cheveux roux. Comme un seul rire abominable, une chanson monta des Serpentards, scandée avec une fierté goguenarde :
« WEASLEY EST NOTRE ROI ! »